Patrice : Chers frères et sœurs en Christ,
Quelle scène bouleversante de l’évangile en ce jour : le vieillard Syméon recevant dans ses bras l’enfant Dieu. Jésus est alors un petit bébé ; il a seulement 40 jours, selon le temps prescrit par la loi de Moïse pour la purification. (Et effectivement, aujourd’hui 2 février, 40 jours se sont écoulés depuis Noël). Pendant longtemps, j’imaginais Syméon porter Jésus à bout de bras, comme dans cette scène si connue du roi lion où le singe Rafiki, le sage, présente le petit Simba à tout le monde… Aujourd’hui, en relisant ce passage, j’ai plutôt l’image très douce de l’enfant Dieu, l’Alpha et l’Oméga, blotti dans les bras du vieil homme. Quelle joie profonde et quelle plénitude de Paix dans ces paroles de Syméon qui exulte, sous l’action de l’Esprit Saint :
« Maintenant, ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta parole. Car mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples : lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël. »
Ces paroles de bénédiction sont chantées et méditées par tous les consacré(e)s du monde entier lors de la prière des complies, chaque soir, avant de s’endormir.
Alors, je vais m’adresser aux 3 sœurs Missionnaires de l’évangile qui nous font la Joie de leur présence parmi nous ce matin :
• Quels liens faites-vous entre cette fête de la présentation du Seigneur et votre vie de consacrée ?
Sœur Fabienne : La présentation du Seigneur marque l’arrivée du sauveur du monde grâce à la prophétie du vieillard Syméon, grâce à ses parents et à leur bénédiction pour lui. Au moment de leur première profession, les consacrés reçoivent aussi la bénédiction de leurs parents. Comme Joseph et Marie qui offrent Jésus à Dieu, les parents bénissent l’offrande de leur enfant au Seigneur. Après, comme Jésus a donné sa vie pour le salut de tous, les consacrés sont appelés par lui, à porter la bonne nouvelle par le témoignage vécu et partagé. Ainsi les consacrés sont appelés comme Jésus à accomplir leur mission avec humilité et simplicité.
Le don de moi-même que je fais chaque jour me permet de vivre cette simplicité et humilité et de cultiver l’esprit synodale pour faciliter la mission qui m’est confiée avec mes sœurs. Cette mission, j’essaie de l’accomplir avec liberté et générosité et cela me rend heureuse. La Lumière de la bougie signifie pour moi accepter de donner ma vie jusqu’au bout et d’accepter la volonté de Dieu dans les réalités quotidiennes.
• En quoi les vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance peuvent être signe d’espérance aujourd’hui pour notre monde ?
Sœur Reine-Marie : Pas facile de répondre…
D’abord, ces trois vœux de pauvreté, chasteté et d’obéissance, on les appelle aussi « Conseils évangéliques » et ces conseils valent pour tous les chrétiens. En fait, ces 3 voeux n’en font qu’un, celui de vouer, de donner toute sa vie au Seigneur et les religieux font ce voeu publiquement dans l’Église.
Alors, comment ces 3 conseils peuvent être signe d’espérance aujourd’hui pour notre monde ? Jésus a vécu pleinement ces 3 conseils évangéliques et il nous invite à les vivre en communion avec lui. Demandons lui de les vivre en nous.
On dit souvent : « Je veux me débrouiller tout seul, je n’ai besoin de personne ! » Mais Jésus nous invite à la pauvreté, c’est-à-dire, à accepter de mettre en commun ce que nous avons et à partager et dans nos relations, à accepter de recevoir des autres, de dire merci. Recevoir et donner donnent beaucoup de joie… Mais il faut le choisir !
On dit souvent : « L’important, c’est de profiter de la vie et puis, chacun pour soi ! » Mais Jésus nous invite aussi à la chasteté, c’est-à-dire, à reconnaitre que nous sommes aimés par le Seigneur. Il nous invite à aimer à notre tour, toute personne rencontrée sans jamais nous l’approprier ou en faire notre objet et sans jamais nous laisser approprier par les autres. Accueillir et recevoir un tel amour vrai et gratuit peut apporter beaucoup de bonheur dans toutes nos relations.
Enfin, on entend souvent dire : « Je fais ce que je veux… ça ne regarde que moi ! ». Mais Jésus nous invite à l’obéissance et c’est en le regardant vivre qu’on peut deviner ce que ça veut dire. Jésus, contemplait souvent son Père, Il partageait avec Lui, dans la prière, sans doute ses rencontres, sa compassion, ses joies et sa souffrance… Il contemplait aussi le projet ou le souhait de son Père et il était tellement en accord avec Lui, qu’Il faisait la volonté de ce Père de son plein gré, de bon cœur et en adhérant à ce projet et Il est allé jusqu’au bout dans une pleine confiance. C’est sans doute cela la vraie obéissance.
Déjà, nous essayons tous de suivre ces conseils que Jésus a vécus Lui-même, et cela fait grandir le Royaume de Dieu, nous apporte la joie, réconforte ceux que nous côtoyons. En faisant cela, nous faisons l’expérience d’être aimés de Dieu et notre foi en est fortifiée. Et cette Espérance, Jésus nous demande de la communiquer à nos contemporains pour qu’elle devienne leur lumière.
• En quoi votre vie communautaire, avec sa dimension interculturelle, est-elle également signe d’espérance ?
Sœur Fabienne : Les consacrés mettent le Christ au centre de la communauté.
Comme un capitaine, Jésus conduit le bateau sur la mer jusqu’à l’autre rive. Nous le vivons par la prière, le partage, la souplesse quotidienne, la flexibilité et en étant réaliste. Chaque membre est responsable de la bonne marche et est témoin de l’Évangile. Pour vivre les différences culturelles, il faut s’appuyer sur ce que nous avons en commun et oser partager entre nous les choses concrètes de nos cultures. Les membres de la communauté sont appelés à faire régner la communion par l’écoute mutuelle et l’entraide, à vivre les différences par l’ouverture et la compréhension.
Vivre ensemble un même projet nous mène vers le Royaume de Dieu (Aimer, servir le Christ pour le Royaume de Dieu).
Patrice : Merci infiniment pour votre témoignage, pour le don de votre vie, pour être signe de la présence de Jésus au coeur du monde. Votre vie donnée illustre cette parole de Sainte Thérèse que l’on retrouve sur l’affiche crée pour cette fête de la vie consacrée : « Aimer, c’est tout donner ! »
Avec vous, reprenons cet hymne chanté lors de la prière des Vêpres, chaque mercredi en fin de journée :
« Cachés au creux de ton mystère, Nous te reconnaissons Sans jamais te saisir. Le pauvre seul peut t’accueillir, D’un coeur brûlé d’attention, Les yeux tournés vers ta lumière ».
Nous sommes invités à nous faire pauvre, humble comme le vieillard Syméon pour recueillir dans nos bras notre Dieu qui s’est fait encore plus petit, Lui la lumière du monde